On ne compte plus les coups reçus par le présentiel (un vrai punching ball) : de la sidération initiale devant l'arrivée de l'e-learning (il y a 20 ans) à sa quasi disparition temporaire pendant le confinement… Et pourtant, le présentiel est toujours bien vivant ! (on verra prochainement pourquoi).
Sidéré par l’avènement de l’e-learning au début du siècle, bousculé par la créativité débordante du digital learning depuis quinze ans, remplacé par les classes virtuelles pendant le confinement, le « présentiel » est couturé de cicatrices.
Premier temps : le présentiel s’associe à l’e-learning dans le blended learning linéaire
L’e-learning apparaît au mitan des années 1990. Confidentiel, réservé à quelques geeks ; puis, conduit à se développer dans des domaines où il rendait des services distingués : l’utilisation de tutoriels (bureautique, applicatifs métier), formations réglementaires terminées par un quiz démontrant que les collaborateurs avaient obtenu leur habilitation, etc. Les formateurs observent sa montée en puissance, encore faible, avec amusement, parfois un peu de mépris (« ce n’est pas de la formation »), puis une réelle inquiétude devant la difficulté à contrecarrer les arguments de l’e-learning.
Cours en salle et e-learning finissent par reconnaître leurs vertus mutuelles : à l'e-learning, la transmission des connaissances théoriques, les piqûres de rappel, les formations procédurales, etc. ; au présentiel, la pédagogie interactive x participative, jeux de rôle, mise en situation des savoirs, etc. Entente parachevée par le blended learning première manière (linéaire) : le cours en salle raccourci est précédé d’une mise à niveau par l'e-learning qui apportera, post formation, les compléments nécessaires.
Dans ce mouvement, le présentiel ne se remet pas véritablement en cause. Il admet d’être soulagé d’une partie de ses prérogatives ; ce dont les formateurs de métier se félicitent ; ce dont, au contraire, les « formateurs Powerpoint » s’inquiètent (avec raison, car ils ne peuvent durablement concurrencer l’e-learning dans la simple transmission d’informations, même expliquées).
Deuxième temps : le présentiel bousculé par le digital learning
Contexte : progrès et maturité des technologies digitales, apparition des smartphones puis des réseaux sociaux, développement et généralisation de nouveaux usages, accélération du business requérant toujours plus de personnes à former toujours plus vite… Les services formation internes ont été incités à digitaliser en partie leurs offres, alors que les organismes de formation traînaient parfois des pieds de crainte de cannibaliser leur cœur de métier par l’e-learning.
La digitalisation concerne alors les formations sur mesure (métiers) ou transversales ; préférence donnée au mode asynchrone (l’apprenant s’auto-forme avec des contenus en ligne), sans que cette consommation d’e-learning soit toujours pensée en relation avec le cours en salle.
L’innovation digitale bat son plein son plein (micro learning, serious games, gamification, mobile learning, etc.) portée par les nouveaux usages introduits par l’iPhone en 2007, ainsi que par les enjeux forts évoqués plus haut. Les collaborateurs et les managers, qui s’en remettaient auparavant au service formation, ont plus que jamais leur mot à dire, car le Net leur fournit directement les informations, voire des formations.
Le présentiel est bousculé devant tant de créativité des offres et d’appétit des apprenants. Ses modalités habituelles peinent à concurrencer l’effet Waouh des propositions du digital learning. Qu’il use à son tour du digital dans ses animations n’étonne pas - au risque de dévaluer le cours en salle (le formateur est concurrencé par les écrans, les salles de formation ne sont pas conçues pour ce nouveau mix).
Troisième temps : le présentiel remplacé par la classe virtuelle
Interdit durant le confinement, le cours présentiel s’évanouit complètement pendant plusieurs mois. Pour la première fois, il est donné aux professionnels d'expérimenter la disparition pure et simple du format qui était jusque-là au cœur de leur métier.
Les besoins de formation n'avaient pas disparu en même temps ; ils s’étaient au contraire accrus de nouvelles attentes (formation aux nouveaux environnements numérique, adaptation au management à distance, formation au bien-être, etc.).
Dans cette situation, les services formation ont opté pour deux solutions. D'abord, l'abonnement de l'ensemble des collaborateurs (full access) à des bibliothèques de formation en ligne, traitant le plus souvent de sujets transversaux (les formations métier sur mesure ont été les parents pauvres de la période). Ensuite, les « réunions de formation » en ligne qui se sont généralisées depuis le début de la crise. Il s’agit initialement, en effet, de réunions de formation plutôt que de classes virtuelles, le cours en salle étant alors simplement projeté x réduit sur des plates-formes collaboratives telles que Zoom ou Teams, l’urgence empêchant de procéder à un véritable reengineering.
Mais, on ne sous-estimera pas les efforts considérables consentis par les professionnels de formation pour s’adapter à ces nouveaux outils et se former à la conception et à l’animation de classes virtuelles aptes à satisfaire l’exigence des collaborateurs. On notera aussi les progrès accomplis par les plateformes collaboratives ; Teams, par exemple, s’est dotée de nombreuses fonctionnalités qu’on trouve nativement dans les classes virtuelles.
A suivre…
Second volet : « Le présentiel, toujours vivant »
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